Chers lecteurs et chères lectrices d’Attache ta tuque, alors que la France a rebasculé ce début avril en mode confinement, comme l’Ontario et plusieurs villes du Québec (Québec, Lévis et Gatineau), la cabane que j’évoquais la semaine dernière apparaît plus que jamais comme un refuge salvateur. Vous avez été nombreux à réagir et je ne résiste pas au plaisir de partager ici quelques-unes de vos cabanes au Canada.
Dominique nous raconte “un chalet en Estrie, acheté il y a dix ans… Un chalet rabouté, dont certains murs intérieurs sont les anciens murs extérieurs, où les anciens comptoirs de cuisine sont maintenant dans la garde-robe d’entrée, dans lequel certains interrupteurs n’allument rien. Un vieux chalet dont on doit déneiger le toit plusieurs fois en hiver pour éviter qu'il s'écroule. Si confortable, si chaleureux, tellement tout croche… Mon petit paradis.”
Claudine, originaire de Montreuil-sur-Mer et habitant l’Ontario depuis quarante ans, possède depuis vingt ans sa cabane au bord d’un lac : “Bien sûr, nous dit-elle, il y a un côté négatif: ce sont ces satanés moustiques, mouches noires et bestioles de toutes sortes, juste quand la chaleur s’installe ! Mais sinon c’est le paradis. On prend un sauna tous les jours, on va à la pêche, on fait du canoë ou du kayak, des randonnées... on reçoit des amis.”
Jacqueline, elle, n’a pas de cabane au Canada mais y a voyagé tellement souvent qu’elle peut écrire : “je parle de « mes cabanes » au Québec, tous ces endroits merveilleux (en été avec les maringouins, en hiver avec la neige et la poudrerie et le tout encore plus merveilleux à l’automne), de ce St Laurent - que j’ai traversé tant de fois-avec ses baleines, ses bélugas…”
Vous avez aussi confié l’origine de votre propre imaginaire canadien, puisé pour Nathalie dans la chanson Maudits Français de Lynda Lemay, pour Carmen dans Voyage au Canada de Charles Trenet, qui allait “à Toronto en auto, à Montréal à cheval, à Ottawa en oua oua, à Valleyfield sur un fil, à Trois Rivières en litière, au lac Saint-Jean en nageant…”
Ou encore, pour Chantal, dans sa propre histoire familiale. Celle-ci n’est pas banale : pour cette lectrice, la terre de ses ancêtres, c’est… le Québec ! Sa grand-mère maternelle, Québécoise, est revenue dans les années 1920 vivre en Normandie, d’où étaient partis ses aïeux. Chantal n’a jamais pu traverser l’Atlantique pour découvrir la Belle province et pourtant toute son histoire la ramène vers cette terre.
Crédit : Société québécoise du cannabis
Les allers-retours entre la France et la Canada peuvent nous éclairer sur nos propres questionnements. Prenez le sujet de la légalisation du cannabis. La France vient de lancer la première expérimentation jamais conduite dans l’Hexagone sur l’usage thérapeutique de cette plante considérée comme une drogue. Le 26 mars a été réalisée à Clermont-Ferrand la toute première prescription médicale de cette substance. Au total, quelques 3000 patients volontaires vont être impliqués dans cette expérience grandeur nature, dans le cas de cinq pathologies lourdes très précisément identifiées. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé travaille sur ce projet depuis 2018, et l’autorisation de l’expérimentation a été donnée par l’Assemblée nationale en octobre 2019. Une évaluation sera menée; ses conclusions sont attendues pour septembre 2023.
Un usage médical… et remboursé
Au Canada, l’usage médical du cannabis est légal depuis… 2001. Vingt ans déjà ! Le cannabis n’y est pas reconnu comme un médicament en tant que tel, mais un professionnel de santé peut, après consultation, autoriser un patient à consommer du cannabis à des fins médicales. Sur la base de cette recommandation, le patient peut alors faire la demande d’un certificat d’inscription auprès de Santé Canada. Pour se fournir, il peut acheter (par correspondance) le produit auprès de producteurs privés agréés par Santé Canada, obtenir un permis pour le produire soi-même ou obtenir un permis pour désigner un producteur-fournisseur.
Au départ, une seule entreprise était autorisée à produire le cannabis médical mais ce monopole a rapidement volé en éclat et le business du chanvre a attiré de nombreux investisseurs. D’autant que dans la plupart des provinces, l’achat de cannabis à usage thérapeutique est remboursé au titre du crédit d’impôts pour frais médicaux. Il y a aujourd’hui plus de 377 000 certificats en vigueur au Canada. Soit 1% de la population canadienne qui détient une autorisation de consommation de cannabis pour un usage médical.
Principal producteur au monde
Cette légalisation du cannabis thérapeutique a fait du Canada l’un des premiers producteur et exportateur de marijuana au monde, avec des entreprises leaders comme Canopy Growth et Aurora. Et c’est en partie parce que cette légalisation a facilité l’émergence d’un marché “gris” (et parce que le marché noir prospérait aussi) que le gouvernement libéral de Justin Trudeau a promis en 2015 de légaliser le cannabis à usage récréatif. L’objectif affiché était de mieux encadrer le recours à cette substance illicite, la plus consommée au Canada, et de protéger les plus jeunes. En 2015, plus de 40 % de la population jeune et adulte reconnaissait avoir déjà expérimenté cette drogue et plus d’une personne sur dix déclarait au moins un usage dans l’année.
Le Premier ministre lui-même avait avoué publiquement avoir fumé “cinq ou six fois”. Après de vifs débats dans la société, au sein de la communauté scientifique, éducative et juridique, et au Parlement, la légalisation est intervenue le 17 octobre 2018 au niveau fédéral. Une première pour un pays du G7. Les différentes provinces canadiennes ont pu adapter les détails de la loi (modes de distribution et de consommation par exemple). Ainsi, le Québec est la seule province où l’âge légal pour consommer du cannabis a été fixé à 21 ans au lieu de 18 ans. Il y est aussi interdit de fumer dans un lieu public, qu’il soit extérieur ou intérieur.
Deux ans et demi après la légalisation, les chiffres disponibles montrent que la consommation des Canadiens a augmenté : en 2019, plus de 5,1 millions de personnes de 15 ans ou plus ont déclaré avoir consommé du cannabis au cours des trois mois précédant l’enquête de Statistique Canada, contre 4,5 millions de personnes en 2018. En 2020, cette consommation a semble-t-il été aussi encouragée par la crise sanitaire et les confinements. En revanche, les adolescents seraient moins nombreux à fumer. Comme si, en devenant légale, l’herbe avait perdu son pouvoir d’attraction auprès des plus jeunes…
Vous voulez mon avis ? Pour s’évader, mieux vaut encore s’offrir une belle escapade dans une cabane !
A suivre cette semaine
Immigration, impact de la Covid-19, conférence en ligne organisée par la Citim, mardi 6 avril, 16h30, heure de Montréal
Semaine numérique de Québec, appel à candidature de l’Office franco-québécois pour la jeunesse, jusqu’au 7 avril, pour une participation à l’événement qui se tient en ligne du 9 au 16 avril
Relancer sa prospection en Amérique du nord, webinaire organisé par Auvergne-Rhône-Alpes Entreprises, jeudi 8 avril, 14h30
La BD au Québec, webinaire organisé par le Festival Québec BD, vendredi 9 avril, 4 conférences en ligne, de 9h à 15h30